Débroussaillage d'un chemin de randonnée, Régie de Camblanes et Meynac, avril 2022.jpg

À Camblanes-et-Meynac, le souci de l’environnement et l’action sociale se conjuguent avec le dynamisme économique

Implantée sur le territoire de l’Entre-deux-Mers, parmi les coteaux du vignoble bordelais, l’association R.E.V. (Régie Environnement Valorisation) a été créée en 1992 avec pour objectif de permettre à des personnes éloignées de l’emploi de se réinsérer dans la vie professionnelle par le biais d’activités liées à l’environnement. Le dialogue constant qu’elle a su tisser entre associatifs, habitants et élus lui a valu d’être labellisée Régie de Territoire en 2018.

Depuis, le petit poucet qui emploie 32 personnes en CDDI de 26 heures – l’équivalent de 20 postes à temps pleins – et une équipe de 10 salariés voit les choses en grand. Sa vie est aujourd’hui celle d’une Régie de Territoire engagée qui sait marier une culture d’entreprise combative et innovante avec de nombreuses activités de lien social.

Son originalité tient d’abord dans ce qui constitue l’une des activités tournantes de l’équipe dédiée aux espaces verts : la création et l’entretien de chemins de randonnée et de parcours cyclables. Du lundi au jeudi, de 8 heures à 14 heures, deux équipes de travailleurs menées par Didier Pardiac et Frédéric Laverny, parcourent un territoire étendu au sud-ouest de Bordeaux.

En cette journée d’avril, trois employés en insertion – ils sont cinq d’ordinaire – progressent le long d’une piste cyclable pour préparer sa transformation en voie verte. Concrètement, il s’agit de préparer par l’élagage et la tonte des bords de piste, le passage de la surface praticable de deux à trois mètres de largeur.

Ce changement de statut donnera dès lors la priorité aux piétons sur les cyclistes, dont la vitesse maximale sera réduite de 30 à 20 km/h. « Ça ne va pas faire que des heureux » sourit Didier Pardiac, qui surveille constamment les passages des deux roues pour assurer la sécurité de son équipe. En tout, celle-ci devra aménager la moitié du parcours de la voie verte, soit 25 kilomètres, le reste étant assuré par une autre entreprise.

Des ateliers chaque jour

La seconde équipe, sous la houlette de Frédéric Laverny travaille pour la ville de Tresses à l’ouverture d’un cinquième chemin communal – elle a aussi en charge l’entretien des quatre autres et du parcours sportif.

Les espaces verts, pour la Régie de Territoire, ce sont aussi ceux de la commune de Bassans – un marché de Bordeaux Métropole partagé avec la Régie de Quartier de Lormont – où s’active notamment une équipe dédiée à la livraison de bacs poubelles aux particuliers.

Si la Régie de Territoire sait conquérir des marchés, elle n’en développe pas moins un volet très riche d’actions sociales à l’attention de ses employés en CDDI. Celui-ci se déploie chaque après-midi de leur semaine de quatre jours : le lundi est dédié à la sophrologie dans la salle d’un foyer confiée par la mairie de Camblanes-et-Meynac. Le mardi, l’atelier code de la route est ouvert à toutes celles et ceux qui sont inscrits dans une école de conduite.

Le mercredi, la Coop paysanne de Camblanes-et-Meynac met à disposition ses invendus pour alimenter l’atelier cuisine. Le lendemain, le repas préparé sera vendu 50 centimes. Le jeudi est aussi le jour de l’atelier mécanique, dédié aux engins d’espaces verts. Tous les deux mois enfin, une randonnée est proposée. C’est alors une occasion de découvrir le patrimoine historique et naturel de la région. « Dans les équipes, ajoute Frédéric Laverny, ça structure forcément les choses. »

Frederic laverny
Frédéric Laverny, encadrant technique

Le volet formation est externalisé dans un lycée professionnel. Certains y partent deux mois entiers, d’autres alternent dans une même semaine entre journées de cours et travail sur le terrain.

Sortir du cocon

« L’emploi du temps est bien rempli, explique Laetitia Goyou, mais ils sont dans un cocon. Quand ils pensent avoir le rythme, on les envoie en immersion. Parfois ça invalide un projet. C’est un moment qui peut s’avérer nécessaire pour qu’ils se rendent compte que ce n’est pas aussi simple. »

Reprendre le rythme, retrouver la confiance en soi et parfois aussi se remettre à jour administrativement, peut nécessiter six mois.

Dans un territoire rural, certaines personnes sont très isolées et ne sont tout simplement pas repérées par les services sociaux. « Nous avons eu le cas, se souvient Laetitia Goyou, d’un monsieur de 50 ans qui n’avait jamais eu de carte d’identité. Il avait toujours vécu chez ses parents récemment décédés. La simple évocation de sa mère déclenchait ses larmes et il faisait des crises d’angoisse chaque matin. Pour lui, il convenait d’aller sur une orientation RQTH [Reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé]. »

S’ajoutent à cela des problèmes de transport pour des personnes résidant dans de petites communes mal desservies. Et Laetitia Goyou de rappeler que beaucoup de personnes qui intègrent le chantier d’insertion ont des problèmes de santé physiques et mentaux avec lesquels il faut compter. « Certains sortent de dix années de dépression » rappelle-t-elle. Pour eux, en particulier, un tel environnement de travail est sans aucun doute la chance qui leur avait manqué jusque-là dans leur parcours.