Femme s'entrainant à la boxe

La Régie de Quartier de Laxou fait boxer les salariées

En périphérie de Nancy, la Régie propose plusieurs activités pour les femmes du quartier et/ ou les salariées. En plus d’un atelier de trois demi-journées par semaine autour du bricolage, des travaux courants d’entretien et des compétences transverses (expression et outils informatiques, encadré par l’AFPA), une initiation à différentes pratiques sportives — dont des sports de combat — a été imaginée à l’intention cette fois exclusive des salariées de l’équipe propreté.

Nicolas Phanithavong, le directeur de la Régie de Quartier de Laxou, commence par dire que dans son regard d’homme, l’égalité femme-homme devrait être un non-sujet. Mais lorsqu’il en discute avec des femmes, il se rend bien compte qu’elles ne voient pas les choses ainsi. Il précise aussi qu’à la Régie, l’équipe de direction est mixte et qu’en ce moment, la parité est parfaite parmi les chefs d’équipe.

Avant de devenir psychologue et de rejoindre le Mouvement des Régies, il a été professeur de Tae-Kwon-Do. Il en a gardé la conviction que le sport a un rôle à jouer dans les processus de réinsertion. Il y a une dizaine d’années encore, il commençait sa semaine de directeur de Régie par une séance de taï-chi. « Tu nous bouffes une heure » râlaient les encadrants techniques. « Vous verrez que dans les trois heures qui restent le travail sera fait » répondait-il en souriant. Et il avait raison.

Femmes s'entraînant

 

Faire du sport sur son temps de travail

Les actions de lien social pour les salariés de la Régie sont calibrées aujourd’hui sur 10 % du temps de travail. Ce sont pour l’instant deux heures complémentaires en plus des contrats de 20 h, qui ouvrent le droit à un ticket restaurant, un complément précieux pour des personnes qui en majorité étaient au RSA.

Quand, à la sortie des confinements, il a pris la mesure de l’explosion des violences familiales, il a eu l’idée de proposer aux salariées en insertion une initiation aux arts martiaux. « Le projet c’est aussi de créer de la solidarité entre femmes » explique-t-il. Et pour bien faire, des moments d’échange sont prévus autour de chaque séance.

Les salariées de l’équipe propreté bénéficient de dix cours d’initiation — deux de taï-chi, deux de zumba, deux de Tae- Kwon-Do, deux de cardio boxe et deux de judo — un programme qui ne porte pas exclusivement sur les sports de combat, mais aussi sur des pratiques qui renforcent, d’une manière ou d’une autre, la confiance en soi.

À l’issue de chaque séance, la directrice-adjointe Mélisande Faisandel est présente pour accueillir les retours des salariées. « Ce n’est pas très facile, confie-t-elle, elles ont tendance à partir tout de suite après, mais on arrive à parler aussi durant leurs trajets. Pour autant j’ai l’impression que ça correspond à une vraie attente de leur part, que ça leur donne la possibilité de bouger. ».

Mais la vraie nouveauté dans leur parcours, c’est la parenthèse qui leur est offerte de s’abstraire un temps de leur quotidien. « Quand on leur pose la question de ce qu’elles font pour elles, souligne Mélisande Faisandel, au mieux elles disent qu’elles font à manger pour leur famille. »

photo de groupe

Valérie Hénin, légende de la boxe et marraine du projet

Juste avant l’initiation du jour, une sage-femme de la CPAM est venue parler avec la douzaine de salariées impliquées dans le programme — lors de la précédente, les salariées avaient pu prendre part à un atelier de sensibilisation sur le dépistage des cancers féminins.

La séance de taekwondo est animée par une enfant du pays, par ailleurs marraine du projet. Le palmarès de Valérie Hénin est impressionnant et a fait d’elle l’une des premières étoiles internationales de la boxe féminine. Elle a remporté notamment des titres mondiaux en kickboxing (1990 et 1994), en full contact (1993) et en boxe anglaise (1996). Elle a aujourd’hui sa propre salle de sport à Nancy, Le Punch. À Vandoeuvre, le gymnase a été rebaptisé l’an dernier à son nom. À 54 ans, son mètre soixante-treize en impose toujours. « Tenez-vous droites, vous êtes belles » répète-t-elle aux salariées qui l’écoutent religieusement. L’une d’elles a rapidement des vertiges, elle la prend par la main, lui dit de s’allonger les pieds en l’air et de bien respirer. Quelques secondes plus tard, la séance reprend.

Au fond de la salle, plusieurs mannequins aux allures belliqueuses — ils s’appellent tous Bob, précise Valérie Hénin, avec une pointe d’ironie — permettent d’enchaîner coups de poing et coups de pied. Toutes les salariées frappent avec un mélange de concentration et de lâcher-prise, certaines révélant immédiatement une vraie ténacité et de bonnes capacités sportives.

Le cours se termine en musique par des enchaînements synchronisés, qui déclenchent quelques éclats de rire. Nicolas Phanithavong pense déjà à la suite : « J’ai demandé à l’accompagnatrice socio-professionnelle de se renseigner sur les aides pour les abonnements en club. Si une sur les quinze fait le choix de s’inscrire, pour moi, c’est gagné. »

Femmes s'entraînant
Femmes s'entraînant

 

 

 

 

 

 

 

Article et photos : Olivier Favier